Au regard des récentes déclaration du Président du Sénat philippin Tito Sotto qui a déposé un amendement visant à rabaisser l’âge de la responsabilité légale de 15 à 12 ans pour les mineurs ayant commis un crime, Virlanie, en tant que membre du Réseau des droits des enfants (Child’s Rights Network) réitère son opposition à un tel amendement.
Virlanie a toujours défendu les droits des enfants, que ce soit sur le terrain ou institutionnellement. Depuis 2017, Virlanie a établi le pilier plaidoyer visant à faire de la Fondation un acteur clef des réseaux de plaidoyer institutionnels et une source d’information fiable sur les questions relatives aux droits des enfants. Le but de ce département n’est pas seulement de plaidoyer en dehors de la Fondation mais aussi d’intégrer et de diffuser ses valeurs et bonnes pratiques de manière interne, dans les programmes et parmi les employés, volontaires et bénéficiaires.
Le 13 Mars 2017, les employés et volontaires de Virlanie se sont accordés sur deux causes qui nous semblent primordiales dans le contexte actuel: pour défendre le droit à la vie et contre l’abaissement de l’âge de la responsabilité criminelle pour les mineurs.
Lisez ci-dessous notre position contre l’abaissement de l’âge de la responsabilité criminelle pour les mineurs:
Ces dernières années, les Enfants en Conflit avec la Loi (« CICL » pour « Children in Conflict with the Law ») se sont souvent avérés être le groupe le plus bafoué et discriminé parmi les contrevenants à la loi. Trop jeunes pour être considérés comme des adultes responsables au regard de la loi, beaucoup de gouvernements peinent à trouver les réponses appropriées face au problème de la délinquance juvénile. Il y a 11 ans, ce problème a été soulevé et adressé pour la première fois aux Philippines.
En 2006 en effet, la fondation Virlanie, ainsi que deux autres ONG œuvrant pour la protection des droits de l’enfant ont contesté la loi pénale philippine qui prévoyait que, dès l’âge de 9 ans, un enfant puisse être condamné à purger une peine carcérale dans des prisons pour adultes. Surpeuplées, les conditions de détention y sont proprement inhumaines et non conformes aux standards internationaux énoncés par l’ONU dans ses Recommandations pour la Prévention de la Délinquance Juvénile et dans l’article 40 de la Convention des Nations Unies sur les Droits de l’Enfant. Ces lois stipulent que l’intégrité et le bien-être de l’enfant doivent être assurés, et qu’il a droit à « un traitement qui soit de nature à favoriser son sens de la dignité et de la valeur personnelle, qui renforce son respect pour les droits de l’homme et les libertés fondamentales d’autrui, et qui tienne compte de son âge ainsi que de la nécessité de faciliter sa réintégration dans la société et de lui faire assumer un rôle constructif au sein de celle-ci. » (CIDE, Art. 40)
Défendue avec acharnement par l’UNICEF, l’adoption longtemps attendue de la loi sur la Justice Juvénile et l’Aide Sociale (« Juvenile Justice and Welfare Act »), aussi connue sous le nom de « Republic Act » a finalement été signée. Celle-ci a pour vocation d’être « Une loi établissant un système complet de justice et de protection pour les jeunes, créant le Conseil de la Justice pour les mineurs et celui de l’Aide Sociale – dépendants du ministère de la Justice.»Pourtant, par manque de moyens financiers alloués à cette cause par les gouvernements consécutifs, cette loi s’est avérée souffrir de lacunes importantes. Malgré le fait que l’âge de la responsabilité pénale soit officiellement de 15 ans, les enfants ayant commis des crimes aggravés (parricide, meurtre prémédité, viol…) ou multirécidivistes se voyaient tout de même condamnables à la prison dès l’âge de 12 ans, tombant sous le coup d’une autre loi, le Comprehensive Dangerous Drugs Act, 2002. Cette dernière prévoyait pour ces crimes une peine de 12 ans d’emprisonnement.
C’est pourquoi un amendement visant à renforcer la loi sur la Justice Juvénile et l’Aide Sociale a été déposé en 2013.
Dès lors :– Les enfants âgés de 12 à 15 ans ayant commis parricide, meurtre, viol, infanticide, kidnapping et autres crimes majeurs qui étaient toujours passibles de plus de 12 ans d’emprisonnement parce qu’ils tombaient sous le coup d’une autre loi (Comprehensive Dangerous Drugs Act, 2002) sont désormais considérés comme négligés.
– Les enfants âgés de 12 à 15 qui ont commis des crimes plus de trois fois sont également considérés comme négligés.
– La peine maximale sera prononcée contre toute personne majeure qui exploite ou utilise les enfants pour effectuer des actions criminelles.
Cet amendement visait à ce que ces enfants soient considérés comme négligés et puissent, de fait, être placés dans des centres de détention spécialement conçus pour les jeunes, visant, in fine à leur réintégration dans la société une fois leur peine purgée.
En tant que fondation, Virlanie promeut l’engagement des enfants et des jeunes dans « des activités socialement utiles et adopt[e] une sensibilité humaniste envers la société et dans sa vision de la vie. » (Principes directeurs de Riyad, OHCHR, 1990). Défendant les droits de tous les enfants philippins sans distinction, notre fondation a encouragé les gouvernements consécutifs à établir des centres spécialement conçus pour les enfants, garantissant des conditions de vie décentes et visant à leur développement moral.
Même si, aujourd’hui, des institutions de ce type ont été établies par le DSWD (Département des Affaires Sociales et du Développement) et différentes ONG, le gouvernement actuel continue de questionner l’efficacité réelle de ces initiatives. Dans une publication de l’Inquirer datant du 21 novembre 2016, Davo Del Norte Rep. Pantaleon Alvarez, député à la Chambre des Représentant (dépendante du Congrès), a pris position pour rabaisser l’âge minimum de la responsabilité pénale de 15 à 9 ans. Il affirme que « les criminels et les enfants eux-mêmes exploitent l’âge de la responsabilité pénale à leur profit, celui-ci devenant de fait un outil pour échapper à la responsabilité pénale. »
Virlanie s’oppose à cet argumentaire, sachant combien il est stigmatisant pour les enfants des rues, et menaçant pour leurs droits fondamentaux.
« Qu’il soit derrière les barreaux ou dans la rue, un enfant reste un enfant, pas un adulte. », martèle Dominique Lemay, fondateur de Virlanie. « Il a le droit de vivre, de jouer et ne devrait sous aucun prétexte finir en prison. Ce n’est simplement pas sa place. Quel que soit le crime qu’il ait commis, comment réagiriez-vous si votre propre enfant ou votre neveu de 9 ans était jeté dans une prison pour adultes ? Cela vous serait intolérable, n’est-ce pas ? »
« Bien sûr, nous ne sommes pas aveugles. Nous sommes bien conscients du fait que des groupes criminels et mafieux utilisent ces enfants pour commettre les pires horreurs sans risquer de se faire eux-mêmes juger ou emprisonner. C’est pourquoi il est urgent, aujourd’hui plus que jamais, de tendre la main à ces enfants pour leur permettre de sortir de ces cercles délétères. L’établissement de lieux spécialement conçus pour eux, où ils peuvent évoluer dans un environnement sain, encadrés par des travailleurs sociaux, est leur seule chance d’échapper à ces criminels pour qui ils sont des proies faciles. Les communautés, les écoles et les familles doivent prendre leur part de responsabilité et s’engager concrètement pour permettre à ces enfants de réintégrer la société. Pour les sauver de cette exclusion qu’ils n’ont pas choisie, une politique volontariste de prévention et de sensibilisation devrait être la priorité du gouvernement. »